Rapport et Résumé du compte rendu sur la table ronde du ministre tenue en 2008

Table ronde 2008 du ministre concernant la Loi sur les espèces en péril : Rapport sommaire

Le 16 décembre 2008

La Loi sur les espèces en péril (LEP) stipule que le ministre fédéral de l’Environnement doit convoquer une table ronde de personnes intéressées par la protection des espèces sauvages en péril au Canada qui le conseilleront sur ce sujet. Dans le cadre de la deuxième table ronde sur la LEP tenue à Ottawa le 16 décembre 2008, les discussions ont porté sur la mise en œuvre de la Loi de façon à procurer au ministre les renseignements nécessaires pour en améliorer la mise en œuvre et l'informer à l'avance de la tenue de l'examen quinquennal de la loi. La table ronde regroupait un éventail d’intervenants intéressés par la Loi sur les espèces en péril, dont des représentants des gouvernements territoriaux, des regroupements non gouvernementaux intéressés à l'environnement, de groupes de l'industrie et de groupes autochtones.

Le texte ci-dessous dresse les grandes lignes de la discussion et résume les recommandations qui en ont découlé. Celles-ci sont présentées selon les différentes étapes du programme sur les espèces en péril. Tout au long de la discussion, ont a fait état à maintes reprises de la participation des peuples autochtones.

L'évaluation des espèces est un élément clé du processus sur la LEP. Ce processus permet de déterminer l’état des espèces en péril au Canada, à savoir si elles sont disparues, en péril, menacées, préoccupantes ou non en péril. L’inclusion des connaissances traditionnelles autochtones (CTA) dans le processus d’évaluation du COSEPAC et leur prise en compte par la recherche occidentale ont été perçues comme des occasions de participation des peuples autochtones à la LEP. On a par ailleurs souligné la nécessité d'intégrer les CTA dans les sciences occidentales quand vient le temps d'établir les priorités en matière d'évaluation des espèces. Étant donné que les CTA touchent plusieurs étapes du processus sur la LEP autres que l'évaluation, on craint un chevauchement dans la collecte des CTA risquant de devenir irritant pour les détenteurs des connaissances. On a également souligné que la participation au COSEPAC des scientifiques du gouvernement fédéral risque de miner l'indépendance de ce Comité. Plusieurs participants ont mentionné qu’une transparence accrue du processus du COSEPAC (par exemple, en rendant accessible au public les rapports préliminaires qui aident le COSEPAC à effectuer ses évaluations) aiderait à garantir qu'on utilise les meilleurs renseignements disponibles dans le processus d'évaluation.

Le rôle du gouvernement fédéral dans la protection d’une espèce commence quand le gouverneur en conseil (GC), à la recommandation du ministre de l'Environnement, ajoute cette espèce à la liste des espèces en péril, à l'annexe 1 de la LEP. Une fois cette espèce sur la liste de l’annexe 1 de la LEP, on peut appliquer les mécanismes de protection de celle-ci. Lors de la discussion sur l'établissement de la liste et la protection juridique accordée à certaines espèces répertoriées en vertu de la LEP, certains participants ont réitéré qu’il serait souhaitable de tenir compte des données d'une analyse socioéconomique des coûts et des avantages avant de décider d’inscrire une espèce sur la liste. On a également mentionné l’importance d’évaluer le « rendement » dans le cadre d'une analyse socioéconomique. Prenons le cas d'une activité qui occasionne une réduction des émissions de gaz à effet de serre (favorable à de nombreuses espèces). Cet élément pourrait être pris en considération dans l'évaluation de son impact sur une seule espèce. On a également souligné la nécessité de mieux communiquer aux organismes et collectivités concernés les conséquences de l’inscription d'une espèce sur la liste.

Lorsqu'une espèce est ajoutée à l'annexe 1 de la Loi, on procède à la planification, puis à la mise en œuvre de son rétablissement en vertu de la Loi. La planification et la mise en œuvre du rétablissement ont fait l’objet d’une discussion. Les participants à la table ronde ont débattu le fait que de nombreuses espèces attendent encore des stratégies de rétablissement étant donné le grand nombre d'espèces répertoriées lors de l'édiction de la Loi en 2003. On a par ailleurs mentionné que la mise en œuvre de plans de rétablissement s'intéresse tout particulièrement à la protection de l'habitat essentiel, d’où un risque de négligence des autres menaces envers les espèces. Les participants ont souligné que le gouvernement devrait exploiter toute une gamme d’options en vertu de la LEP afin d’atteindre les objectifs de rétablissement, par exemple pour conclure des ententes d'intendance. Les participants à la table ronde ont souligné la nécessité de clarifier certains des termes clés utilisés dans la Loi, dont les termes « résidence » et « habitat essentiel ». Entre autres enjeux liés à la mise en œuvre, on a mentionné un possible chevauchement entre la LEP et les lois provinciales et territoriales, et la nécessité de raffermir la collaboration avec les mécanismes et outils provinciaux et certaines autres lois fédérales, dont la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. En dernier lieu, on a souligné que le processus de planification détaillé du rétablissement exigé par la LEP, qui nécessite beaucoup de temps, peut ne pas convenir à toutes les espèces et risque de réduire les efforts consacrés aux espèces qui en ont le plus besoin.

Au cours de la discussion sur les défis que posent la surveillance et l’évaluation de la mise en œuvre de la Loi, on a souligné que la juste mesure d’une mise en œuvre réussie de la Loi est le rétablissement d’espèces en péril mais cela nécessite énormément de temps. On a notamment souligné que la détermination des exigences en matière d’habitat et des mesures appropriées de rétablissement est essentielle au rétablissement des espèces. Ce travail exige un effort important vu le grand nombre d'espèces et le travail exigé pour entreprendre la planification requise et pour faciliter la collaboration nécessaire à la détermination et à la conservation des habitats et à l’élimination des autres menaces. On a souligné qu’une surveillance et une évaluation efficaces passent par le développement et l’utilisation d’indicateurs sur l’évolution à long terme des espèces.

Tout au long de la table ronde, les participants ont discuté de la participation des peuples autochtones à divers aspects de la LEP et aux programmes connexes. On a souligné qu’il convient de favoriser les occasions d’une participation significative des peuples autochtones étant donné les importantes répercussions de la LEP sur leurs collectivités. On a fait état des obstacles à cette participation, dont le manque de ressources en soutien à leur participation et le manque de processus et de mécanismes pour une participation adéquate. Les participants à la table ronde se sont également demandé si l’on pourrait permettre la chasse de subsistance des peuples autochtones en vertu de l'article 32 (interdictions générales contre l’abattage, le harcèlement, etc.). Unanimement, les participants croient que la chasse de subsistance devrait être permise pour les peuples autochtones.

La table ronde a donné lieu aux recommandations suivantes :

  1. Le ministre autorise l'examen scientifique de l'habitat essentiel de la population boréale du caribou des bois.
  2. Environnement Canada recueillera les connaissances traditionnelles autochtones et consultera les peuples autochtones sur les besoins de la population boréale du caribou des bois en matière d'habitat essentiel.
  3. Il faut modifier la Loi sur les espèces en périlafin d'exempter les centrales électriques antérieures à la loi des interdictions des articles 32, 33 et 58 à condition que ces centrales aient fait une demande d’accord ou de permis en vertu de l’article 73 et qu’elles planifient un rétablissement en vertu de la Loi.
  4. L'alinéa 73(3) (a) de la Loi devrait être modifié pour permettre aux installations existantes d'obtenir un permis. Cela signifierait que des permis seraient délivrés en vertu de la LEP aux installations existantes qui adopteraient la meilleure des solutions quand toutes les autres solutions raisonnables à l'activité permettant de réduire les incidences sur les espèces auraient été évaluées.
  5. Le paragraphe 73 (9), qui définit la durée maximale d'un permis et d'un accord en vertu de la LEP, devrait être modifié pour que la durée d'un permis tienne compte de l'espèce en péril en particulier, au lieu d'être assujettie à une durée maximale déterminée à l'avance.
  6. On prendrait un règlement précisant un mode efficace de renouvellement des permis.
  7. On doit modifier la définition de « résidence » pour spécifier qu'elle ne s'applique qu'aux espèces aquatiques une fois que le ministre compétent aura déterminé, décrit ou défini la résidence des espèces aquatiques et aura publié cette définition dans le registre public. Et on pourra ajouter un nouveau paragraphe à l'article 33 précisant que ce dernier ne s'applique pas à une espèce aquatique sauf si la résidence de cette espèce est déterminée géographiquement et publiée dans le registre public.
  8. Environnement Canada devrait publier des lignes directrices claires d'une politique sur l'application cohérente des définitions de l'habitat et de l'habitat essentiel. Le gouvernement devrait notamment définir l’habitat essentiel comme un habitat si rare ou important que sa disparition mettrait en péril la capacité de l’espèce d’atteindre ses objectifs de rétablissement.
  9. Un règlement devrait être pris en vertu de l’article 41 (4) de la Loi exigeant du ministre de fournir une explication sur la désignation d’un habitat comme habitat essentiel, avec texte expliquant comment on en est venu à cette conclusion et pourquoi cet habitat est essentiel à la survie ou au rétablissement de l’espèce.
  10. Le paragraphe 27 (2) de la Loi devrait être modifié pour stipuler que le ministre doit tenir compte des coûts et des avantages socioéconomiques de l'inscription de l'espèce sur la liste avant qu’une décision ne soit prise.
  11. Le paragraphe 41 (1) devrait être modifié pour stipuler que la stratégie de rétablissement comporte une évaluation des coûts et avantages socioéconomiques afférents.
  12. On devrait dresser une liste d'autorisations en vertu d'un régime de réglementation qui satisferait les exigences habilitantes énoncées à l'article 74 ou à l'article 78 de la LEP, y compris des autorisations en vertu de la loi sur les pêches, de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale et des législations provinciales. Cette liste d’autorisations en vertu d’un régime de réglementation devrait être définie dans des lignes directrices de politique non exécutoire ou dans un règlement pris en vertu de la LEP.

Étant donné l’examen quinquennal parlementaire que doit mener le Comité de la Chambre sur l’environnement et le développement durable, toute modification à la Loi ne pourra être étudiée par le gouvernement qu’après conclusion des travaux et présentation des recommandations du Comité. Les recommandations faites avant la fin des travaux du Comité pourraient être perçues comme une démarche à l'encontre de ceux-ci.

En ce qui concerne la population boréale du caribou des bois, l’examen pour la détermination d’un habitat essentiel a été publié le 9 avril 2009. On planifie actuellement la collecte des connaissances traditionnelles autochtones et l’exécution des études occidentales nécessaires à l'élaboration d'une stratégie de rétablissement. La stratégie de rétablissement proposée, une fois évaluée et prête, sera publiée dans le registre de la LEP.

En ce qui concerne les permis, le ministère dressera les grandes lignes d'un processus efficace de demandes et de renouvellement de ceux-ci. En vertu des lois actuelles, il est impossible d'être exempté des exigences sur la délivrance des permis. Le ministère préparera du matériel d’orientation qui expliquera les facteurs pris en compte pour délivrer ou non un permis en vertu des critères énoncés dans la Loi. Dans le cadre de ce processus, le ministère évaluera la nécessité d'un règlement sur le renouvellement des permis. Le matériel d’orientation ou le règlement sur un processus de renouvellement clarifierait les critères de délivrance d’un permis sans toutefois garantir son renouvellement.

Suivant le travail sur les politiques et autres documents d’orientation liés à la LEP, le ministère précisera les notions de résidence, d'habitat et d'habitat essentiel en vertu de la LEP. Un document d’orientation supplémentaire expliquera les critères dont tient compte le ministère dans la détermination d’un habitat essentiel.

À l’égard des coûts socioéconomiques, les trois ministères fédéraux responsables procèdent déjà à une évaluation de ces facteurs et sont censés avoir atteint l'étape décisionnelle afin d'ajouter des espèces à la liste des espèces en péril. En outre, le gouvernement exige que chaque règlement compose une évaluation des coûts et des avantages et que ces derniers soient publiés avec les projets de règlement dans la partie 1 de la Gazette du Canada. Le gouverneur en conseil tient toujours compte de ces coûts avant de prendre une décision. Le ministère continuera à développer les outils de cette évaluation en collaboration avec les organismes consultatifs afin de les améliorer. La stratégie de rétablissement est un document qui regroupe les données scientifiques, les connaissances traditionnelles autochtones et les connaissances d’une collectivité dans le but d’établir des objectifs en matière de rétablissement. Dans l'élaboration des mesures de rétablissement en collaboration avec les parties intéressées, on tient compte de l'analyse socioéconomique.

En ce qui concerne les autorisations ou les permis délivrés en vertu des lois en vigueur, les trois ministères fédéraux responsables s'engagent à clarifier les facteurs pris en compte pour délivrer ou non un permis ou une autorisation en vertu d’un autre document juridique fédéral ou de régimes provinciaux et territoriaux dont on considère qu'ils ont la même valeur qu'un permis délivré en vertu de la LEP. À ce point de la mise en œuvre de la loi, on ne prévoit pas dresser une liste des autorisations équivalentes. Étant donné que les menaces envers une espèce ou son habitat essentiel varient d'une espèce à l'autre, il conviendra d’évaluer chaque permis séparément pour déterminer s’il impose les mêmes critères qu'un permis équivalent de la LEP.

Participants :

Participants :

Ellen Adelberg Directeur général adjoint Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP)
Catherine Cobden V.-P. Environnement Association des produits forestiers du Canada (APFC)
Kevin Daniels Vice-chef Congrès des Peuples Autochtones (CPA)
Stewart Elgie Professeur agrégé Université d’Ottawa
Pierre Guimond Président et chef de la direction Association canadienne de l'électricité
Hon. Daniel Shewchuk Ministre de l'Environnement Gouvernement du Nunavut
Mary Simon Présidente Inuit Tapiriit Kanatami (ITK)

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